Élection présidentielle : en dehors du cirque politicien, une candidate communiste révolutionnaire

Εκτύπωση
décembre 2016 - janvier 2017

Depuis que les textes préparatoires à notre congrès, publiés dans ce numéro de Lutte de classe, ont été rédigés, Fillon a remporté la primaire de la droite, évinçant Sarkozy puis Juppé à la surprise générale, tandis que Hollande a tiré les conclusions de son profond rejet en renonçant à se représenter.

Pour autant, à un mois de la primaire du Parti socialiste et trois mois de la publication des candidats officiels, le casting final de l’élection présidentielle est loin d’être connu. Le rejet du PS et de la gauche parmi les classes populaires, la défiance croissante vis-à-vis du personnel politique traditionnel, l’aspiration au renouveau des acteurs de la vie politicienne, laissent ouverts bien des scénarios. La seule chose que l’on peut affirmer est que le vainqueur de cette élection, quelle que soit la distribution du second tour, sera un adversaire haineux des travailleurs qui mettra en œuvre la politique exigée par la bourgeoisie.

Candidat principal, mais pas unique, de la droite, Fillon part certes favori, tout comme Marine­ Le Pen, pour participer au second tour. La victoire à la primaire de Fillon, obtenue en mobilisant les électeurs traditionnels bien bourgeois de la droite sur un programme aussi libéral sur le terrain économique que réactionnaire sur celui des idées sociétales, a le mérite de la clarté : c’est la politique que mènera le futur locataire de l’Élysée, quel qu’il soit. Elle confirme aussi la progression des idées réactionnaires dans la vie politique.

Si Bayrou entretient les doutes sur sa candidature, tout en négociant les conditions de son ralliement à Fillon, Macron vise lui aussi les électeurs du centre ou de droite qui pourraient être effrayés par les aspects trop réactionnaires de Fillon. Macron, ex-ministre de Hollande, ex-cadre de la banque Rothschild, énarque et ex-inspecteur des finances, se dit « ni de gauche ni de droite » et se pose en candidat « antisystème » partisan d’une « révolution » ! Lui, qui est fier de porter des costumes à plusieurs milliers d’euros, a choisi la ville populaire de Bobigny pour annoncer sa candidature. Macron a des soutiens médiatiques. Il a de riches sponsors, parmi lesquels on trouve Xavier Niel, patron de Free, ou Claude Bébéar, président d’honneur d’AXA. Mais il n’a ni véritable appareil militant, en dehors de son très récent mouvement En marche, ni beaucoup de soutiens politiques d’envergure. Macron pourra-t-il aller jusqu’au bout ? Prendra-t-il des voix plutôt à droite ou plutôt à gauche ? Cela va préoccuper surtout ses anciens amis du PS.

Du côté de la gauche gouvernementale, l’annonce du retrait de Hollande a dégagé le chemin pour ses concurrents. Valls, qui lui a bien savonné la planche, s’est aussitôt déclaré. Celui qui a mis en œuvre la politique antiouvrière de Hollande, qui a affiché les positions les plus droitières sur les migrants, la sécurité, le terrorisme, qui a repris à son compte jusqu’à la démagogie islamophobe de la droite, se pose aujourd’hui en rassembleur du Parti socialiste. S’il paraît évident que Valls est aussi discrédité que Hollande parmi les classes populaires, que feront les électeurs de la primaire socialiste ? Quel sera le rapport de force entre Valls, Montebourg, Hamon ou encore Peillon, sorti opportunément de sa retraite politique ? Il faudra attendre les 22 et 29 janvier pour le savoir.

Bien plus que le programme qu’ils affichent, ce qui les départagera, c’est l’influence de leurs réseaux dans les milieux socialistes et les contours, le nombre et la composition sociale de l’électorat qui se déplacera à cette primaire de la gauche.

Mélenchon est parti en campagne tout seul, en dehors de la primaire de la gauche et sans demander l’avis du PCF, son partenaire principal dans feu le Front de gauche. Après de longs mois de tergiversations, le PCF a décidé – à une courte majorité de 53 % de ses adhérents – de le soutenir, renonçant à une candidature autonome. Ce ralliement, après celui de 2012, n’est certes pas une surprise pour un parti qui n’a cessé depuis des décennies de soutenir un politicien bourgeois arriviste, en donnant comme seule perspective politique aux travailleurs la victoire de « l’union de la gauche ». Il n’est pas non plus inconditionnel, le PCF ayant besoin d’obtenir des assurances quant à la répartition des candidats aux législatives, pour espérer conserver ses députés. Nul doute que le PCF ne conditionne l’apport de ses parrainages à des accords de répartition des circonscriptions qui lui soient favorables. Mais en la matière Mélenchon, qui n’a aucun député, n’est pas en mesure de garantir grand-chose au PCF, qui préférerait pouvoir négocier avec le PS.

Le ralliement du PCF à Mélenchon a au moins le mérite d’une clarification : la seule candidate qui se revendiquera du communisme dans cette campagne sera Nathalie Arthaud. Au premier tour, le seul qui compte, le seul qui permette de s’exprimer, le bulletin de vote Nathalie Arthaud permettra aux travailleurs conscients d’affirmer que leur classe sociale a des intérêts politiques à défendre, et qu’ils n’accordent aucune confiance aux politiciens qui aspirent à diriger les affaires de la bourgeoisie. Ces travailleurs affirmeront que l’avenir de la société ne peut pas être la plongée dans la misère de ceux qui produisent tout, ni la plongée dans la barbarie de toute la planète, à mesure que s’aggrave la crise du capitalisme. Même minoritaires, ils se prononceront pour une candidate convaincue que l’avenir de la société passe par le renversement de la dictature du capital et la prise du pouvoir par les travailleurs.

13 décembre 2016