Faisant suite à la publication du livre-enquête Les fossoyeurs1, et à la tempête de témoignages et d’indignation qu’elle a provoquée, le Sénat a mis en place une commission d’enquête, tandis que le gouvernement Castex a annoncé un « vaste plan de contrôle » des établissements hospitaliers pour les personnes âgées dépendantes (Ehpad). Il n’y a rien à attendre de ces gesticulations et des déclarations faussement choquées des responsables politiques, qui connaissent parfaitement, et de longue date, la situation indigne subie par les pensionnaires de nombre de ces établissements et les conditions de travail de leurs salariés.
Le nouvel « or gris »
Jusqu’au début du 20e siècle, les inégalités de la vie entre prolétaires et bourgeois s’exprimaient brutalement, depuis le plus jeune âge jusqu’à la vieillesse et la mort. Le sort des personnes âgées étant à la charge des familles, il dépendait des moyens de celles-ci, et plus encore, dans les familles populaires, de l’esprit de solidarité et d’entraide entre générations. Seuls les plus fragiles et les indigents étaient, si l’on peut dire, pris en charge par la collectivité. Ils étaient le plus souvent enfermés dans des hospices publics, des institutions à caractère répressif à l’image des dépôts de mendicité créés par l’Ancien Régime et qui avaient pour but d’isoler, comme la prison, les pauvres et les vieux jusqu’à leur mort. Quelques hospices privés apparurent néanmoins, comme ceux mis en place au début du 20e siècle par la famille Schneider au Creusot, dans le cadre de sa politique visant à fixer une main-d’œuvre qui fuyait jusque-là ses bagnes industriels.
En 1905, une première loi instaura l’obligation pour les hôpitaux et les hospices « de porter assistance aux vieillards, aux infirmes et aux incurables privés de ressources » : 450 000 personnes en relevaient en 1936. L’Église, qui avait une place prépondérante dans le domaine des soins et de la prétendue assistance aux pauvres, ouvrit également des centaines d’établissements pour personnes âgées.
Mais, jusqu’à la Deuxième Guerre mondiale, la grande majorité des travailleurs, en particulier dans l’industrie et les mines, mouraient avant d’avoir atteint l’âge de 60 ans, raison pour laquelle même les premières mesures instaurant des pensions de retraite furent qualifiées de « retraites pour les morts » par le mouvement ouvrier. Au seuil des mal nommées « Trente Glorieuses », la France ne comptait ainsi que 16 % de plus de 60 ans (aujourd’hui 18 420 000, 27 % , dont 6,6 millions de plus de 75 ans, 10 %). Et bien peu d’anciens finissaient leur vie hors de leur domicile. Comme le pointait un rapport de l’Inspection générale de la santé en 1960, la population avait fait « patiemment d’héroïques économies pour ne pas mourir à l’hospice ».
Les choses commencèrent à changer progressivement, puis de façon significative, à partir de la décennie suivante, avec l’allongement de l’espérance de vie et la mise en place d’un véritable système de retraites. Encore aujourd’hui, l’espérance de vie des ouvriers et des employés reste cependant inférieure de plusieurs années à la moyenne. Celle des plus pauvres est inférieure de treize ans à celle des plus riches, selon les statistiques de l’Insee. Et il faudrait également considérer les statistiques mesurant l’espérance de vie en bonne santé pour prendre toute la mesure des différences qui persistent entre les ouvriers ou les employés du nettoyage et les catégories les plus privilégiées.
Des hospices aux maisons de retraite lucratives et aux Ehpad
Les hospices furent quelque peu modernisés par l’État à partir du milieu des années 1970, transformés en « maisons de retraite », et assortis de « clubs du troisième âge ». Mais cette évolution, prévue pour s’étendre sur quelques années, prit plus de trente ans.
Les lois de décentralisation de 1982 transférèrent aux départements l’essentiel de la charge de l’administration de ces établissements et le droit de donner les agréments pour créer et gérer ces établissements. Les maisons de retraite se spécialisèrent de plus en plus dans la prise en charge de patients souffrant de lourdes pathologies, comme la maladie d’Alzheimer, sans bien sûr que s’accroisse sensiblement le taux d’encadrement par l’embauche de personnel supplémentaire.
Mais cette période marque surtout l’entrée de plus en plus massive des entreprises capitalistes sur le marché des maisons de retraite. Au nom de la nécessité de faire face à l’arrivée des générations du baby-boom, les portes furent ouvertes en grand aux capitaux qui prétendaient s’y investir et suppléer la faiblesse des moyens accordés par l’État à ce secteur. En 2002, une loi « rénovant l’action sociale et médico-sociale » fut promulguée : le terme Ehpad, établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, remplaçait désormais celui de maison de retraite.
En mai 2006, Dominique de Villepin, alors Premier ministre, qualifia d’historique son projet de création annuelle de 5 000 places dans ces structures jusqu’en 2012, alors même qu’il ne pouvait combler que la moitié des demandes à venir des familles. Tout le monde gardait pourtant en memoire l’episode caniculaire de l’ete 2003, au cours duquel pres de 15 000 décès avaient ete recenses. Une partie notable de ce bilan était imputable au fait que nombre d’établissements n’etaient absolument pas equipes pour proteger leurs pensionnaires et manquaient de personnel pour les prendre convenablement en charge.
Banquiers et assureurs se jetèrent sur le marché de la dépendance, à l’instar du Crédit agricole, un des principaux actionnaires du groupe Korian, le leader français des maisons de retraite privées. Des gestionnaires, formés au management et à la chasse aux coûts, furent recrutés. Ils y appliquèrent les méthodes déjà utilisées dans l’industrie. Ce sont les témoignages de plusieurs de ces anciens responsables, brisés par les pressions subies d’en haut et ne voulant pas assumer davantage la maltraitance institutionnelle imposée dans leurs établissements, qui ont fourni l’essentiel de la matière de l’ouvrage du journaliste Victor Castanet.
La façon dont les vautours du capital ont mis leurs griffes sur ce secteur en pleine expansion, que leur a livré l’État, reflète à elle seule quelques-unes des tares de l’économie capitaliste.
Pillage des fonds publics, exploitation et déshumanisation
« L’or gris » est devenu en deux décennies un marché comme un autre, dont les capitalistes et les financiers entendent tirer le maximum de profits. Les conséquences en sont bien connues par ceux qui y travaillent, par les proches, mais aussi par une partie du grand public, comme en témoignent les reportages et les récits publiés depuis une vingtaine d’années, ou les rapports officiels qui se sont entassés, pour être aussi vite oubliés, sur les bureaux des ministres. D’un côté, on a assisté à la formation de groupes privés puissants, de l’autre à la dégradation des conditions de prise en charge des personnes âgées. L’exploitation des travailleurs de ces établissements, comme celle des hospitaliers, des salariés du secteur médico-social et de bien d’autres, s’est aggravée en raison du manque de personnel pour faire face à l’afflux des pensionnaires, de l’accélération des cadences, de la précarisation, du stress permanent, etc. Pour donner le change, l’État a multiplié en vain les rapports et les dispositions censées améliorer les conditions de prise en charge des personnes âgées dépendantes, sans véritablement rien imposer ni contrôler.
La compression des coûts, le lean management (gestion frugale), c’est-à-dire la recherche du profit maximum et d’une rationalisation poussée à son paroxysme, est à l’origine des scènes révoltantes décrites par tous les témoins et les employés de ce secteur : économies réalisées sur la nourriture, sur les protections urinaires, au mépris de toute considération pour la dignité humaine, sur le nombre de douches, etc. Quelques centimes par jour et par pensionnaire économisés en imposant des produits de mauvaise qualité mais aussi des ristournes ou des rétrocommissions aux fournisseurs, et ce sont des millions qui s’alignent en fin d’année sur les bilans comptables des sociétés. Et qu’importe si les résidents sont privés de toute vie sociale, sont dénutris ou sont abandonnés dans leurs excréments ! Qu’importe aussi l’enfer vécu par les salariés, dont les femmes constituent l’immense majorité et ceux en contrats à durée déterminée une fraction grandissante ! Qu’importe le non-respect du droit du travail le plus élémentaire, la répression envers les militants syndicaux, du moins ceux qui n’appartiennent pas aux syndicats « maison » mis en place par les directions ! Le titre du livre Les fossoyeurs résume à lui seul ce qu’inspirent ces méthodes barbares, qui ont permis à des groupes capitalistes de se construire et d’imposer leurs conditions aux personnes âgées et à l’État comme à leurs salariés.
Ces méthodes ont conduit à une situation plus dramatique encore avec l’épidémie du Covid-19, le chaos pour les personnels et les résidents qu’il a entraîné et son lourd bilan en termes de décès.
L’emprise grandissante du privé repose aussi sur le mode même de financement de ces établissements. Celui-ci repose sur trois sources principales :
- Le budget « soins », qui est intégralement à la charge de l’Assurance maladie et qui sert à financer le personnel soignant (infirmiers, aides-soignants, médecins coordinateurs, psychologues, etc.) et les équipements médicaux indispensables pour la prise en charge des personnes les plus vulnérables et les plus dépendantes. Ces dotations publiques annuelles assurent aussi l’achat ou la location de lits, de fauteuils roulants et jusqu’aux pansements et aux protections hygiéniques des résidents.
- Le forfait « dépendance », financé majoritairement par les conseils départementaux et, en partie, par les résidents. Cet argent, qui dépend du degré de perte d’autonomie (mesuré par le sigle GIR, pour groupe iso-ressources), alimente les diverses prestations d’aide et de surveillance des personnes en perte d’autonomie (aides-soignants, psychologues…). Plus la dépendance est reconnue importante, plus les sommes versées aux établissements s’élèvent. Pour assurer le maximum d’entrées d’argent, les groupes les plus voraces se donnent donc les moyens d’assurer à tout prix un taux d’occupation le plus élevé possible, souvent au-delà de 95 %, quitte à faire entrer des patients présentant des troubles psychiatriques dangereux. Ils ont tout intérêt également à recevoir des résidents dont les pathologies sont les plus lourdes, car celles-ci donnent lieu à des financements plus conséquents.
- Le forfait dit « d’hébergement » enfin, lié aux dépenses d’administration, d’hôtellerie, de restauration et d’animation, qui reste à la charge du résident.
Mais même les salaires des auxiliaires de vie et des agents de service hospitaliers, qui assurent officiellement l’entretien ou l’aide aux repas, mais souvent bien d’autres tâches, sont pris en charge par des fonds publics.
En d’autres termes, l’argent public ruisselle vers les Ehpad privés de tous les côtés. Au total, il représente près de 40 % du chiffre d’affaires d’une résidence.
Malgré cela, le prix mensuel médian qui reste à la charge du résident pour une place, dont il faut parfois attendre des mois voire des années avant qu’elle se libère, atteint plus de 2 000 euros. Mais il peut grimper jusqu’à 12 000 euros dans certains établissements pour familles bourgeoises, sans aucune garantie d’ailleurs que, derrière le décor et les plaquettes publicitaires, les pensionnaires y soient véritablement mieux traités, comme le rappelle longuement Victor Castanet en décrivant l’établissement de luxe Les bords de Seine de Neuilly. Il faut rajouter à ces dépenses celles permettant l’accès à Internet, l’entretien du linge, le coiffeur ou la présence d’une dame de compagnie !
Une concentration et une financiarisation de plus en plus poussée
Si l’on compte aujourd’hui plus de 7 500 Ehpad (pour 600 000 lits environ), trois groupes (Korian, Orpea et DomusVi) dominent le marché français, avec plusieurs centaines d’établissements chacun, et ont étendu leurs tentacules bien au-delà de l’Hexagone : dans l’Union européenne tout d’abord, mais aussi en Chine ou en Amérique latine. Ces sociétés n’ont pas échappé à la loi inhérente à l’ensemble du système capitaliste, qui veut que la concentration entraîne la formation de quasi-monopoles et que cette domination s’exerce bien au-delà des frontières nationales.
Les groupes Orpea, Korian, DomusVi, Maisons de famille et Colisée, pour ne citer que les cinq plus importants, possèdent ainsi plus de 1 300 établissements hors de France, où les opportunités de création de nouveaux établissements se sont révélées plus vastes dans la période récente. Ce sont donc des centaines de milliers, voire des millions de pensionnaires sur lesquels ils ont prospéré au fil des ans. Fin 2019, le groupe Orpea dirigeait à lui seul 442 établissements, dans 23 pays et sur trois continents.
Mais ces grands groupes privés ont également étendu leur parasitisme à d’autres activités liées au marché du troisième et du quatrième âge échappant jusque-là en grande partie à la domination du capital. Ils dirigent désormais des résidences-seniors, dont les pensionnaires peuvent gérer leur quotidien de façon autonome, des cliniques de soins de suite et de réadaptation (SSR), des cliniques psychiatriques, des services d’hospitalisation à domicile (HAD) et des sociétés de services à domicile assurant l’aide à la personne ou les soins infirmiers à domicile.
Ce sont autant de canaux par lesquels la quête du profit pénètre et s’impose, aux dépens des personnes âgées et, au-delà, de toute la société.
Cotes en Bourse, Orpea, Korian et les autres ont, depuis leur constitution, rapporte des dizaines de millions de benefices chaque annee a leurs actionnaires. Ceux-ci ont de quoi saliver, tout en mettant en avant ce que ces gens-la appellent « une connotation sociale positive », voire « ethique ». En d’autres termes, de tels placements vous transformeraient en bienfaiteurs de l’humanité ! Le groupe Orpea par exemple obtient des taux de marge (l’Ebidtar) entre 25 et 35 % dans ses établissements ! Son chiffre d’affaires a doublé entre 2014 et 2020, pour atteindre près de 4 milliards d’euros. Et leur rapacité est de même nature que celle qui prévaut dans les secteurs de l’industrie. Une dizaine de patrons d’Ehpad figurent aujourd’hui dans le classement des 500 plus grandes fortunes françaises. Les investissements dans les Ehpad sont vantés auprès des particuliers par les banques ou par de simples margoulins comme assurant une rentabilité hors du commun. C’est du moins vrai pour les gros actionnaires.
Il n’est sans doute pas anodin d’ailleurs que l’un des DRH d’Orpea avait été recruté au sein de l’UIMM, le syndicat patronal de la métallurgie. Ce n’est pas étonnant quand on sait que la famille Peugeot, via sa holding Peugeot Invest, est depuis dix ans le deuxième actionnaire d’Orpea, aux côtés du premier fonds spéculatif mondial, BlackRock.
Faisant mine de s’offusquer des pratiques d’Orpea (pour exiger plus d’investissement dans les industries pétrolières ou du tabac !) l’économiste Jean-Charles Simon commentait : « En comparaison, un bon vieux pétrolier ou marchand d’armes passerait pour un parangon de vertu. » C’est en réalité une des lois de ce système économique, où les profits des uns attirent les appétits des autres : nul ne peut survivre s’il ne pousse pas à fond les feux de l’exploitation pour ses salariés et de la rentabilité pour ses actionnaires.
Opacité et absence de contrôle
Dans leur développement parasitaire, ces grands groupes ont depuis toujours bénéficié de l’opacité de tout le fonctionnement de l’économie et de la comptabilité des entreprises, des largesses de l’État, mais aussi des liens que leurs dirigeants entretenaient parfois jusqu’au sommet de celui-ci. Castanet relate notamment le rôle joué par Xavier Bertrand, l’actuel président LR de la région Hauts-de-France, lorsqu’il occupait les fonctions de ministre de la Santé entre 2004 et 2012, période faste durant laquelle les autorisations d’ouverture d’Ehpad et de cliniques privés se sont multipliées. La Banque publique d’investissement, Bpifrance, censée financer les petites et moyennes entreprises, avait noué un partenariat de premier plan avec Orpea et le fonds souverain russe RDIF, officialisé fin 2019 lors d’une visite à Moscou du ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire. Le projet, qui devait voir treize établissements sortir de terre en Russie, s’est arrêté en février dernier en raison du scandale qui a touché ce groupe en France. Quant à Emmanuel Macron, lors de sa première visite officielle en Chine en 2018, il avait invité, parmi les grands patrons venus passer des contrats, Yves Le Masne, alors directeur général d’Orpea.
Comme tout bon capitaliste ou directeur financier de n’importe quelle grande entreprise, les dirigeants de grands groupes ont mis au point des stratagèmes divers pour détourner de leurs objectifs officiels les sommes allouées par l’État. Censés contrôler l’attribution des fonds publics et leur gestion, les agences régionales de santé (ARS) et les départements ne disposent ni des moyens humains ni d’un véritable pouvoir d’investigation sur la comptabilité de ces entreprises. Chacune lui est transmise sous la forme d’un « compte d’emploi » où figure ce que Korian, Orpea ou les autres veulent bien y faire figurer. Ceux-ci peuvent en pratique ponctionner toute une partie des sommes qui leur sont attribuées soit pour le paiement de leur personnel, soit pour l’achat de matériel. Elles facturent aux départements ou à l’État comme elles l’entendent, c’est-à-dire au prix fort, tout ce dont elles ont besoin et surévaluent avec la même facilité leurs propres dépenses, quitte à déclarer dans leurs effectifs des salariés qui n’existent même pas. C’est une version moderne du roman Les âmes mortes de Gogol, dans lequel le personnage principal recevait de l’État tsariste des revenus pour des serfs décédés depuis des années.
En outre, depuis 2017 et la mise en place des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM), au nom de l’autonomie et de la liberté, les établissements qui appartiennent à un même groupe dans une certaine zone géographique reçoivent des dotations de façon globale. Ce système leur permet de mutualiser leurs moyens et d’échapper encore plus facilement aux velléités de contrôle.
À la suite de l’émotion suscitée dans l’opinion par la multiplication des témoignages et des récits sur les Ehpad, le gouvernement a donc évoqué récemment la mise en place de contrôles, un « choc de transparence » et vouloir « taper fort ». Au cours d’un déplacement courant mars dans un Ehpad public du Val-de-Marne, le ministre de la Santé, Olivier Véran, a même expliqué : « Pour recréer la confiance, nous voulons une transparence totale. » En période électorale, c’est bien le moins qu’il pouvait dire ! Mais de telles déclarations, offrant d’une certaine manière la garantie de l’État, visent peut-être aussi à rassurer les actionnaires et les « investisseurs » inquiets de l’effondrement du cours boursier des principales sociétés spécialisées dans ce secteur, qui sont placées sous les feux de la critique depuis janvier. Et ce d’autant plus que la presse a révélé par la suite que le principal dirigeant d’Orpea avait, lui, vendu ses actions au plus haut avant la parution du livre Les fossoyeurs qu’il savait prochaine.
Mais tout cela n’est que poudre aux yeux et il y a de fortes chances pour que toutes les lois et rapports visant à réformer la « politique du grand âge » ne se traduisent que par des mesures sans réel effet sur un système que la Cour des comptes estime « à bout de souffle ». Seule une mobilisation des travailleurs pourra inverser l’évolution engagée. Seule leur intervention directe pour contrôler les comptes des grands groupes et les dépenses publiques, les embauches, la nature des contrats passés pourrait mettre un terme à cette opacité et imposer la plus grande transparence. Les familles pourraient dans ce cadre prendre toute leur place, ainsi que certaines associations. Mais le sacro-saint droit de propriété et les lois bourgeoises, affinées depuis plus de deux siècles pour protéger les profits, l’empêchent. C’est bien pour cette raison que nous le combattons. Il n’y a aucune raison que les capitalistes qui ont exploité les travailleurs tout au long de leur vie poursuivent et étendent encore leur parasitisme sur les vieux jours de ces derniers. L’expropriation de ces rois de « l’or gris » est une nécessité et une mesure de salut public que les travailleurs auront à réaliser également.
Au Moyen Âge, l’Église contrôlait la vie des hommes depuis leur naissance jusqu’à leur mort. La bourgeoisie y a substitué sa propre domination et la loi du profit à tous les âges de la vie. Le sort des personnes âgées dépendantes comme le pont d’or fait aux groupes capitalistes dans ce secteur dans la période récente illustrent point par point l’évolution de toute l’économie, et non les prétendues « dérives gestionnaires » de tel ou tel groupe. Ils dessinent également ce que doit être la réponse : le renversement de la bourgeoisie et la construction d’une société où la prise en charge de la vieillesse sera détachée de toute considération de rentabilité. Ce sera l’une des tâches de la société communiste pour laquelle nous militons.
21 mars 2022
Rapport du 28 février 2022 sur « La prise en charge médicale des personnes âgées en Ehpad ».